Traversée du canyon Charyn. Il coupe en deux une large vallée verte et, en plus du spectacle, nous offre les premières côtes ardues à grimper sur le sol kazakh.
Les premiers kilomètres au Kazakhstan sont une succession de traversées de grandes steppes faisant paraître des sommets enneigés en arrière-plan. La différence avec la Chine est aussi qu’il y a bien moins d’endroits où se ravitailler. Du coup, nous revenons à la base : les pauses se font sur le bord de la route en cherchant le peu d’ombre qui s’offre à nous.
Le plus gros choc après la traversée de la frontière avec la Chine ce sont les habitants. Les kazakhs se rapprochent plus du stéréotype russe : de grands gaillards bien bâtis au regard froid, parfois hostile. On sent l’influence soviétique qui a fait l’histoire récente du pays. Mais sous la croûte dure se trouve des cœurs tendres la plupart du temps. Ils nous aiment bien, nous les français ! Et ils nous le font bien sentir. Patricia Kaas est notre emblème national ici.
Cette petite fille vient de Mongolie, d’Oulan Bator plus exactement, et vit à Almaty avec ses deux frères et ses parents qui nous accueillent chez eux pour quelques jours. Elle est fière de nous montrer les instruments venant de son pays. Celui-ci est en bois, c’est un objet de décoration, mais son père nous explique qu’ils sont normalement en os et diffuse ainsi un son exceptionnel.
Consulat général du Tadjikistan à Almaty. Le tout pour illustrer de longs jours d’attente face aux procédures administratives à n’en plus finir, surtout pour le visa de l’Ouzbékistan. Les tadjiks ont été sympas et nous ont fait le visa en 24h ! Notre budget prend un petite claque au passage...
Lors de notre séjour à Almaty, Taz, un de nos hôtes, n’a cessé de vouloir nous emmener crapahuter dans les montagnes situées à l’aplomb de la ville. Stressés par nos complications avec la bureaucratie et un peu fatigué de grimper et de suer, nous avons eu la chance de pouvoir compter sur une mauvaise météo pour justifier notre refus de partir dans les montagnes. Nous savons bien qu’il y avait de superbes randonnées à faire dans cette région mais il est parfois difficile pour les gens de comprendre notre besoin de REPOS, de civilisation, de sorties, de discussions autour d’une bière, d’interactions avec des personnes parlant français ou anglais.
Almaty n’est pas une ville de charme. L’architecture y est rustique, le gris prédomine et les petites fenêtres donnent une allure de prison à certains de ses bâtiments. Si ce n’est pas pour des raisons financières, la ville peut vous attirer pour l’environnement dans lequel elle est implantée. Les amateurs de montagnes tomberont sous le charme en oubliant rapidement les rues tristes et impersonnelles de la cité.
Bienvenue en Asie centrale. Ici, le cheval est roi : il est l’outil du berger et du fermier. Loin là-bas, dans les montagnes, bien avant que l’homme ne tente d’y construise des routes, les nomades se déplaçaient grâce à lui par-dessus les cols enneigés. Nous sommes fascinés.
Nous ne nous lassons pas des contrastes qu’offrent ces collines vertes sur fond de montagnes enneigées à près de 5000 mètres. Si nous avons la sensation de voyager dans un tableau en perpétuel mouvement nous sommes en réalité sur les terres des ces hommes et de ces bêtes.
Nous sommes quasiment les seuls clients ce soir là à manger dans ce petit restaurant. Ici la mère applaudit sa fille en train de chanter un karaoké. Nous finirons notre soirée à boire de la vodka à la santé de la propriétaire de cette cantine qui fête son anniversaire et a bien l’intention de marquer le coup. Enfermés à clé dans la salle avec la propriétaire et la cuisinière nous trinquons, rigolons, tentons de leur apprendre quelques mots de français et finissons la nuit allongés sur les chaises du restaurant. Au Kazakhstan : quand l’homme n’est pas là, les femmes dansent .
Les nomades d’Asie centrale existent toujours et voici leur habitation : la yourte est traditionnellement en peau, avec décoration intérieure selon les coutumes, elle contient un poêle au centre surplombé d'une ouverture pour évacuer les fumées et aussi éclairer le lieu. Voilà où se centralise leur convivialité. Elle est rapidement montable, il n'y a qu'une pièce et vous pouvez vite oublier votre intimité au sein de cette demeure.
Après avoir parcouru les plaines kazakhes, nous passons par-dessus la chaîne Alatauy pour rejoindre la frontière kirghize, juste de l’autre côté. Ce jour-là, Eole est avec nous et nous offre un fort vent de dos pour nous aider à la tâche.
À une centaine de kilomètres d'écart !
Vue du dessus, nous voyons le centre d'Almaty où le béton est roi, parcouru par de grosses voitures luxueuses et animé par l'excitation d'un pays libre depuis une vingtaine années.
En dessous, l'air frais véhiculé par le vent de la steppe, de grands espaces à la vue dégagée et cette sensation de liberté...
Un contraste qui définit bien notre quotidien dans ce long voyage.
Morgan : « En 1000 jours de voyage j’ai du être en short, torse nu et en claquettes pendant au moins 365 jours. J’enfile une chemise ou un t-shirt lorsque la température est trop basse, que le soleil tape trop fort, que nous arrivons en ville ou parfois pour être plus présentable sur la photo. Mais pourquoi vivre ainsi ? Et pourquoi pas ? Je pense que ma première motivation est de réduire le nombre de lessive. Moins de chaussettes à laver et peu d’habits à faire sécher la journée sur le vélo. Aussi, j’aime la sensation de l’air qui glisse sur la peau et entre les orteils. C’est quand je me rhabille ou pire, quand je remets des chaussures, que je découvre le confort dans lequel j’étais dans un minimum de tissu.»
Siphay dit : "Les surprises de ce type sont moralement très fatigantes. Même si je prends ces situations avec dérision je dois admettre que c'est dur lorsque je crève une dizaine de fois en 2 ou 3 jours seulement. Ce n'est pas fini !"
Siphay est devenu expert dans l’art du gonflage. Avec 5 crevaisons en un jour, nous avons eu le temps d’apprécier la flore alentours et les vieilles voitures Lada qui constituent encore une bonne partie du parc automobile kazakh. Ces crevaisons sont provoquées par la jante elle même qui vient percer la chambre à air de l’intérieur. Avec du scotch, de la vielle chambre à air et de la colle il essaye de reconstituer un fond de jante lisse. Mais ce n’est pas 100% fiable. Ce n'est que le début de nombreuses pauses spontanées au milieu de nulle part.
Quand nous avons une rivière pour nous laver plutôt que nos gourdes de vélo, nous sommes heureux. Quand, en plus, nous avons un coucher de soleil sur des montagnes à plus de 4000m en fond, nous sommes au paradis !
Brian : « Demain nous serons au Kirghizstan, encore un pays à la consonance bizarre qui laisse rêveur. A commencer par cette chaîne de montagnes impressionnante devant nous que nous devrons passer, aussi petits que nous soyons devant son immensité. Je me demande ce qui se cache derrière et cette simple curiosité suffit à faire jaillir l’étincelle qui fera s’embraser en moi l’envie de la gravir. »
Les montagnes s’embrasent sous les couleurs chaudes du dernier coucher de soleil kazakh. Derrière la chaîne des Ala-Toosu se cachent encore bien d’autres cols à atteindre. Les terres kirghizes nous réservent des embûches que nous préférons ne pas connaître avant de nous y aventurer…