Le pouvoir des rêves (1/3)
Il y a 6 ans nous recevions un message d’un jeune belge. Nous étions en train de construire le radeau pour descendre le Yukon, lui était dans une période de doutes : échec scolaire, révolté contre la vie, écœuré par le système éducatif, chocs émotionnels… Son message est touchant et, comme à chaque fois, nous prenons le temps de répondre. Mais comment avoir les mots justes face à une telle situation ? Notre voyage autour du monde peut-il avoir des conséquences qu’on ne soupçonnerait pas ?
Aujourd’hui Jean-Hugues travaille avec nous, dans nos bureaux, sur son premier film (de très belles images avec une histoire aussi émouvante que surprenante). L’entraide continue, chacun apporte ce qu’il peut à l’autre et ainsi vont les projets. Voici l’histoire de Jean-Hugues :
À 5 ans arrive le moment pour moi de faire mes premiers coups de pédales sur mon nouveau vélo. Nous sommes derrière notre maison familiale dans la campagne de Morhet. Mon frère pose sa main sur mon dos, mes soeurs regardent le spectacle, mon oncle un peu plus loin se prépare à prendre la photo. “Il faut toujours regarder loin devant toi pour ne pas tomber !” me coache mon frère, avant de me pousser pour m’élancer. J’appuie sur les pédales, fait vaciller ma roue avant de gauche à droite pour chercher l’équilibre avant de me stabiliser sous l’encouragement de la famille.
Après l’excitation, la peur ne tarde pas à m’envahir lorsque je réalise que je ne sais pas comment faire demi-tour. Ne sachant pas encore bien actionner les freins, je rate mon premier virage et fonce dans le bas-côté pour finir avec un plongeon dans les hautes herbes. Tout en rigolant, mon frère arrive pour me sortir de là : “Ce n’est pas grâve frérot, les piqûres d’orties, c’est bon pour la circulation du sang !”. Cette centaine de mètre parcouru représente ma première aventure ! Beaucoup de gamelles et quelques mois plus tard, mon premier rêve se réalise, me voilà parti à l’école à vélo comme un grand.
Mes jeunes années défilent. Ardemment, je sillonne de plus en plus les chemins agricoles de l’Ardenne belge. Je gagne les courses avec les copains, roule à travers les champs, saute les rivières et grimpe dans les arbres pour y construire des cabanes de plus en plus sophistiquées. A 13 ans arrive l’adolescence en ville. La campagne ne m’intéresse plus. Je laisse pousser mes cheveux, j’ai une casquette à l’envers, je me cherche entre devenir rappeur, rockeur, danseur ou skater. Je découvre le B.M.X. et les skate-parcs où je vais enchaîner maladroitement des figures. Au même moment, les premiers téléphones avec des caméras arrivent. Je découvre de l’intérêt à filmer mes actions et à réaliser mes premiers montages vidéos que je partage sur mon blog. En vérité, je m’applique plus à ça que sur mes devoirs et mon parcours scolaire devient de plus en plus chaotique. “ On ne sait pas quoi faire avec toi ! “ me répètent les profs. Je déteste l’école.
A 16 ans, en 2011, ma vie sombre dans la tristesse. Je suis chamboulé profondément en apprenant dans un contexte difficile le décès de ma chère grande soeur. Face à ce choc émotionnel, je n’ai plus le goût à m’épanouir dans quoi que ce soit et rentre en décrochage scolaire. Dans une situation pareille, il est plus facile de se rebeller contre la vie. Mon vélo prend la poussière pendant que je traîne dehors à tuer le temps, du temps pourtant si précieux. Bien que mal, six mois après, je commence à me ressaisir grâce à quelques personnes bienveillantes et décide de m’inscrire dans une autre école pour me donner une nouvelle chance. Un peu par hasard, je démarre une formation d’agent d’éducation (éducateur). Doucement, je reprends alors goût aux études en étudiant la psychologie, l’éducation à la santé et la communication … Je fais deux stages dans le milieu professionnel en tant qu’éducateur. Malgré mon succès en stage, où on me propose même de m’engager car ils sont content de moi, paradoxalement, le système scolaire me freine. Il juge mes capacités sur quelques notes écrites sur du papier et non sur ma capacité générale à m’intégrer dans le monde du travail.
Au printemps 2012, mon envie de sortir rouler revient, mais n’ayant plus de vélo, j’ai ressorti au fond du garage un vieux VTT rouillé que ma mère avait offert à mon paternel, il y a plus de 20 ans. Régulièrement, je roule de plus en plus avec ce dinosaure jusqu’au jour où une idée me vient à l’esprit: “est-il possible de voyager à vélo?”. Cette question me taraude l’esprit avant que je décide, un soir de m’installer devant l’ordinateur pour taper dans la barre de recherche de Youtube: “ tour du monde à vélo”.
Je découvre alors une série de vidéos qui s’affichent dont plusieurs nommées: “Solidream”
“Nous voyageons autour du monde à vélo. Cette vidéo résume la première moitié de notre voyage de 3 ans autour du monde, en 2010 et 2011.
Nous avons traversé des climats extrêmes de la planète à l’aide de nos vélos et aussi grâce à toutes les personnes qui nous ont aidés sur le chemin. Il n’y a pas besoin de beaucoup pour réaliser ses rêves de voyage, et c’est précisément ce que nous voulons montrer dans notre projet, et dans cette vidéo également.”
Je n’en revenais pas, c’est possible ! Ces gars-là l’ont fait !
Après avoir visionné toutes leurs vidéos, j’en parle autour de moi et les montre à tous mes potes. La plupart des mecs dans ma classe ont comme idoles Messi ou Ronaldo. Moi, c’est clair que c’est eux !
Six mois après ma découverte, en jugeant le nombre de mes échecs en cours, j’apprends que malgré mes efforts la direction de l’école veut à nouveau me faire redoubler. Sur un coup de tête, je monte dans ma chambre et commence à écrire un email à l’équipe de Solidream.
En quelques mots, je me présente en faisant part de mes ambitions fortes. Moi aussi, je veux voyager un jour à vélo. Il n’y a aucune question derrière mon message, je veux juste les remercier de me faire voyager virtuellement à travers leurs aventures.
Un mois après, quelqu’un de l’équipe m’envoie ce message depuis le Canada:
“Nous sommes contents de lire que nos aventures te donne envie de faire des choses, d’entreprendre et de te dépasser.
Peut être que la vie n’est pas facile pour toi aujourd’hui, mais dans des situations comme la tienne il y a ceux qui baissent les bras et ceux qui se battent et deviennent plus fort chaque jour.
Je comprend aussi que ce soit difficile pour toi à l’école mais je suis obligé de t’inviter à te ressaisir pour ne pas perdre ton temps sur les bancs de l’école. Ton temps est précieux. Exploite-le à fond. Si tu es en classe profites en pour apprendre et évoluer en bien. Quand tu finis les cours investis toi dans les choses que tu aimes. Fais les choses avec passion et tu pourras réussir tout ce que tu entreprends. L’essentiel est de faire les choses à 100%.
Si tu as besoin de conseil nous pouvons essayer de t’aider. Écris-nous et nous te répondrons quand nous aurons le temps.
Au plaisir de te rencontrer
Morgan pour l’équipe “
Yeah, je suis tellement content qu’ils aient pris le temps de me répondre! Ce message arrive au bon moment ! Ce sont les vacances d’été, mais j’ai le nez dans mes cours. Exceptionnellement, la direction a accepté que je repasse mes examens à nouveau.
Me voilà boosté à bloc, cette phrase: “je suis obligé de t’inviter à te ressaisir pour ne pas perdre ton temps sur les bancs de l’école” résonne en moi. Dorénavant, je commence à développer une réelle motivation personnelle à réussir. Je ne veux plus décrocher mon diplôme juste parce qu’on me le demande et parce que c’est une étape obligatoire, mais parce que le plus vite je l’aurai, le plus vite je gagnerai la liberté de voyager ! Avec un nouvel état d’esprit, je deviens plus assidu et passe avec succès mes examens ! Me voilà alors en dernière année d’étude! Biiim!
Pour mes 18 ans, mon frère et ma mère me propose de se cotiser pour m’offrir un vélo. Ils savent que j’en rêve. C’est un cadeau très symbolique souligne mon frère. Mon choix se fait alors sur un VTT d’entrée de gamme avec des fixations pour portes bagages. Il me propose d’autres vélos sympas, mais ils ne m’intéressent pas car je veux un vélo pour voyager. Je n’ose pas dévoiler mon projet devant lui, ou devant la famille. Je pense que les rêves, c’est comme la soupe. Mieux vaut ne pas ouvrir le couvercle pendant la cuisson!
Fin du chapitre 1/3
La suite de l’histoire de Jean-Hugues dans un prochain article très prochainement. Vous découvrirez ses premiers voyages et les belles conséquences qui en découlent…
Voici la bande annonce de son film et le lien vers son DVD ici