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L'expérience Outback, longue route vers les tropiques | Solidream - Rêves, Défis et Partage - Récits, films documentaires d'aventure
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Siphay dans la jungle

L’expérience Outback, longue route vers les tropiques

L’Outback, c’est grand. Très grand. Donc à vélo ça peut être franchement long à traverser. Et ça peut vouloir dire plusieurs choses finalement : désert aride peuplé de rien d’autre que des touffes de bush, une savane digne des paysages d’Afrique ou encore la jungle tropicale peuplée de crocodiles réputés pour leur agressivité. Voici la suite du récit de notre traversée des grands espaces du centre de l’Australie.

Kite-bike dans le Red Centre

Morgan en action en kitebike avec la remorque Aevon

Morgan en action en kitebike avec la remorque Aevon

Finies les vues à l’infini sur le désert, la végétation commence à se pointer tranquillement alors que nous roulons vers le nord. La température est étouffante : nous roulons parfois sous 47°C à l’ombre. Dans ces conditions, respirer par la bouche rend la gorge sèche au bout de 5 min. Respirer par le nez assèche les muqueuses et cela peut devenir très désagréable. Il faut boire, encore et encore, de l’eau presque brûlante dans nos gourdes, en faisant attention à ne pas épuiser nos réserves de 10 L chacun. L’eau est toujours un problème : arrivés à Marla, l’eau n’est pas potable. Morgan, encore un peu fiévreux, va demander pour utiliser les douches normalement payantes qui nous seront finalement offertes. Avec cette chaleur, le cadeau est précieux ! Par la suite, le gérant du seul petit magasin trouve de l’intérêt à notre aventure et nous indique un « water tank », qui contient de l’eau de pluie, situé 3 km plus au Sud-Ouest.

Le lendemain, les conditions sont bonnes : vent d’est de 12 noeuds (environ 20km/h) et une grande ligne droite vers le nord. C’est parti, nous sortons enfin nos ailes et voici 4 rigolos au beau milieu du désert en train d’essayer de manipuler l’aile d’une main et de soulever un vélo de près de 70 kilos de l’autre. Le bilan fait quand même plaisir : ça marche !!! Tout le monde réussit à avancer avec son aile, Morgan enregistre une pointe de vitesse à 35 km/h, bien aidé par son kite. Nous ne pédalons plus. Énorme,  nous venons de concrétiser une idée vieille de plusieurs années ! L’enthousiasme est au rendez-vous.

Morgan note : « A cette vitesse, sans protections, tenant le guidon d’une seule main et avec le bord de la route à seulement quelques mètres de mes roues, j’ai franchement flippé. Mais quelle satisfaction, celle de concrétiser une idée qui pouvait sembler un peu farfelue. »

Mais le rêve, nous le savons, ne va pas durer longtemps : la route n’est pas une grande ligne droite de 3000 km et le vent force, nous nous faisons un peu « arracher » par nos ailes. Pour couronner le tout, nous commençons à nous faire engueuler par les rares automobilistes qui se demandent bien ce qu’on fabrique. C’est clair, c’est un peu dangereux. Nous décidons de plier après 2h de fun. Une voiture de police passe 20 min plus tard… Nous le savions que ce serait difficile, mais nous sommes contents d’avoir prouvé que cela fonctionnait. Cela nous donne des idées pour, pourquoi pas, réessayer ailleurs, autre part que sur une route.

Rencontres du désert

Jewels, notre guide personnel autour d'Alice Springs

Jewels, notre guide personnel autour d’Alice Springs

Nous pensions pouvoir nous ravitailler dans les roadhouses (Aires de repos) mais les prix y sont vraiment excessifs, nous n’y achèterons seulement 1 kg de pâtes négocié à $5 dans les cuisines du restaurant et parfois une bouteille de coca fraîche, salvatrice sous cette chaleur ! Nous rencontrons d’autres voyageurs à vélo qui vont vers le sud et partageons nos expériences : Jean-Marc, un retraité ancien ingénieur sur les routes depuis 3 ans et demi. Puis le soir Patrick et Chantal, un couple franco-suisse en voyage depuis la France depuis plus de 2 ans. C’est toujours agréable de rencontrer des cyclo-voyageurs, nous sommes comme un cercle d’amis sans nous connaître à l’avance.

Alice Springs, cette ville plantée au milieu de l’Australie, nous y arrivons à cours de nourriture vers 21h, exténués. Nous courrons au supermarché encore ouvert et nous offrons un petit plaisir : 1L de jus d’orange chacun bu presque cul-sec, tellement nous commencions à être déshydratés. C’est fou les états dans lesquels on peut se mettre à vélo, on finit par tellement apprécier les choses simples.  Brian dira même : « Les gars, c’est mieux que le sexe ! ». Le lendemain, nous allons au KFC, un fast food, où internet est gratuit. Là, la propriétaire du restaurant, Jewels, s’étonne de voir nos vélos empilés à l’entrée. Nous lui exposons notre projet et elle décide, avec son copain, de nous offrir un menu chacun ! Nous discutons un peu plus et elle propose de nous emmener le lendemain en voiture visiter les environs ! Peu après, nous rencontrons Robert, un habitant, qui nous invite à boire un verre, puis un ami à lui, Bear, qui nous invite chez lui pour la nuit ! Le lendemain, le rendez-vous est honoré avec Jewels qui nous embarque dans la chaîne de montagne des McDonell’s Range au centre de l’Australie, ou Red Centre, pour la couleur de sa terre. Nous nous retrouvons dans des endroits splendides, à Simpson’s Gap et Eelerie Creek. Nous nous baignons dans une eau claire et fraîche et profitons enfin du seul jour de repos que nous avons pris durant les derniers 1600 km. Bref, c’est le paradis au milieu du désert !

Brian raconte : « L’idée m’est passée par la tête d’aller vers Uluru, ce fameux monolithe en plein milieu du désert où des hordes de touristes s’amassent. Mais c’était 400 km aller-retour à vélo… Et en fait, aucun d’entre nous n’avait envie d’aller faire le touriste donc nous n’y sommes pas allés. Finalement je suis bien content d’avoir laissé la place au hasard des rencontres, l’expérience en a été beaucoup plus unique. Je crois que l’industrie du tourisme a tué la vraie définition de ce qu’est réellement un voyageur : aller par soi-même au hasard des rencontres et accepter ce qu’elles voudront bien nous offrir. Ce tour du monde à vélo me le prouve un peu plus chaque jour. Je trouve ça tellement plus palpitant que de me serrer avec d’autres dans un bus et m’entendre dire ce que je dois faire et photographier ! »

Rencontre heureuse avec un habitant natif d'Australie

Rencontre heureuse avec un habitant natif d’Australie

A Alice Springs, nous rencontrons les aborigènes, ce peuple vieux de 60 000 ans, qui vivait en Australie avant que l’homme blanc vienne y fourrer son nez. Leur histoire est intéressante mais, depuis à peine 200 ans qu’ils ont été découvert, elle est bien triste : un grand nombre des habitants natifs ont été tués par les maladies européennes (variole, rougeole, grippe…), mais aussi ravagés par l’alcool et les drogues que nous leur avons apporté. La population visible aujourd’hui a perdu sa culture ancestrale.

Morgan livre son impression : « Jamais je n’ai vu autant de tristesse et de vide dans le regard d’Hommes. Si la situation des aborigènes est quelque peu similaire à celle des indiens d’Amérique elle m’a beaucoup plus marqué ici en Australie.  Les natifs èrent dans les rues, s’enivrent sur les trottoirs, laissent les journées passer en oubliant leur fierté et leur dignité… Ils semblent complètement perdus dans le monde que nous leur avons imposé et en discutant avec les locaux il ne me semble pas qu’il y ait de solutions pour sortir de cette impasse. S’il existe quelques exceptions, des tribus encore isolées ou des aborigènes ayant réussi à s’adapter à notre monde matérialiste et individualiste, elles sont trop rares. »

Longue route vers le nord

La longue route vers le nord tropical

La longue route vers le nord tropical

Pour ne pas commettre la même erreur que pour remonter à Alice Springs, nous nous chargeons de 10 jours de nourriture, nos vélos doivent peser près de 80 kilos avec l’eau que nous emportons… Pour ne pas rouler lorsqu’il fait trop chaud, nous nous levons très tôt le matin, plusieurs fois à 4h. Nous roulons ainsi à la fraîche, nous n’avons rien d’autre à faire que rouler et arriver au prochain point d’intérêt, des centaines de kilomètres plus loin. Un jour, nous sommes motivés et battons notre record de distance en établissant une étape de 257 km, ayant commencé à 4h30 et fini vers 1h du matin, en environ 12h de vélo ! Et encore le vent n’était pas vraiment  favorable.

La végétation change peu à peu, les arbres se font de plus en plus grands, le climat passe de sec à humide tout doucement, le bruit des insectes de plus en plus fort. Et enfin la voilà, la première pluie du climat tropical du nord de l’Australie. L’air est moite. Nous arrivons au début de la saison humide et, quasiment chaque soir, un orage éclate. Le vent de face, toujours lui, rend notre progression parfois pénible. Nous arrivons finalement à Mataranka, où des sources thermales au milieu de la jungle nous offrent un cadre paradisiaque où passer la nuit et la matinée suivante, au milieu des chauve-souris qui essaient de trouver le sommeil dans les palmiers. Cadre unique et surprenant que celui-ci, nous sommes au top !

Etienne livre son sentiment« Cette traversée du désert australien fût pour moi assez particulière. En effet, contrairement à ce que j’appréhendais, ce ne fût pas tant le défi physique qui posa un problème, mais bel et bien celui du mental. L’enchaînement des journées de vélo, additionné aux courtes nuits que nous passions et la chaleur qui nous assommait la journée rendait l’expérience étrange. Parfois, notre patience était mise à rude épreuve. Nous étions tous un peu à fleur de peau. Heureusement que nous sommes tous de très bons amis pour pouvoir nous soutenir et nous supporter aussi bien; cela renforce encore plus nos convictions sur les bienfaits du voyage. Les belles rencontres et les petits oasis que nous avons croisé sur la route ont été comme toujours des moments magiques et salvateurs ».

Etienne dans les eaux thermales près de Mataranka

Etienne dans les eaux thermales près de Mataranka

Arrivée à Darwin

Nous profitons enfin de quelques nuits de repos à Katherine chez des couchsurfers, à 320 km de Darwin, après quasiment 3000 km depuis Adelaide. La pause est salvatrice ! Les dernières centaines de kilomètres sont assez vallonnées et le climat devient très humide, nous sommes en sueur toute la journée, même pour dormir. Cela nous rappelle pas mal l’Amazonie.

Siphay expliqueSi proche de l’arrivée, c’est l’épreuve psychologique pour moi ! Près de 6000 km australiens sous la pluie, du vent plein la face, la chaleur assommante et dans la monotonie du désert. Mais tout cela n’était pas grand chose. Le plus dur est quand on approche du but : je sais que mon corps est fatigué, voilà plusieurs mois que nous sommes sans cesse ensemble, que chacun a besoin de retrouver son espace privé, sa liberté. Et nous voilà proches d’une grosse ville, ce qui signifie un gros trafic. Plusieurs centaines de kilomètres avant la ville, les véhicules n’arrêtent pas de nous frôler à grande vitesse (130km/h limitation locale sur route de type départementale). Ils me surprennent souvent, je ne les entend pas toujours et ils me font peur… Si une voiture nous touche à peine, cela deviendrait fatal. Deux d’entre eux auront eu droit à mes cris d’énervements. Il faut continuer, on est au bout… Je suis aujourd’hui fier de voir ce que représente ce parcours sur la carte du pays, un réel continent !

Fin d’un continent donc. Bientôt le début d’un autre. Nous restons une dizaine de jours à Darwin pour vous concocter une vidéo d’enfer et continuerons notre route en Asie en janvier à partir de Bangkok en Thailande. Ce sera le dernier continent avant de rentrer à la maison en France pour l’été prochain !

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